Voici quelques textes que j'ai écrits en
2013.
Regarde dans mes yeux. Regarde bien au fond de
ceux-ci. Entre le brun, le vert et le gris. Oublie la mer et les vagues,
prolonge seulement ton regard vers l’horizon. Oublie les nuages ou la pluie et
concentre-toi sur le ciel étoilé. Examine bien cette étoile, au fond du ciel.
Celle qui brille le plus. Laisse-toi guider par elle. Comme un marin en mer, tu
trouveras refuge en suivant l’astre du ciel qui éclaire le plus. Laisse tes
pieds glisser dans le sable chaud d’une terre vierge. Étends-toi sur la plage
que j’ai à t’offrir et respire. Respire l’air de la mer et de la liberté. La
liberté que chaque marin mérite après un long voyage entre les vagues puissantes
et menaçantes de la vie. Souffle. Expire le mal qui te tiraille. Recrache l’eau
salée que ton expédition t’a obligé à avaler. Vide tes poumons. Détends-toi.
Laisse la chaleur de mon île t’envelopper, te réconforter et te protéger. Je ne
peux pas te promettre que jamais la tempête ne viendra noyer mes rivages, mais
tu n’as qu’à y construire ton domicile et chaque fois, la vague, à la fin de tes
voyages, te portera jusqu’à moi. Je serai toujours là. Fidèle. Ensemble, l’un
protégeant l’autre contre chacune des tempêtes. L’île ne sera plus vierge et le
marin ne sera plus jamais perdu.
* *
*
J’aurais voulu
jeter le blâme de mes mains tremblantes sur le vin que je venais de consommer.
J’aurais voulu accuser l’alcool pour la chaleur qui m’enveloppait du cœur
jusqu’aux joues. J’aurais voulu reprocher à la boisson la maladresse qui
m’empoignait au niveau des genoux. J’aurais voulu, mais je n’aurai pas pu. Je ne
peux pas nier les émotions, les sentiments et les réactions que mon corps
éprouve lorsque d’un seul regard, tout bascule. Lorsque le maelstrom
d’embrasement me noie d’un feu intérieur qu’une simple brise enracine
profondément en moi. Lorsque je perds pied en m’accrochant aux papillons qui
battent des ailes pour survivre à la tempête violente et incontrôlable qui
m’ébranle tout entières. Les voix et le son des instruments que j’étais venu
écouter m’apparaissaient aussi lointains qu’inaccessibles. La plus belle mélodie
et le plus beau poème étaient joués par les battements de mon cœur qui
s’affolait dû à ta proximité et à ta présence. Tes doigts sur ma nuque, comme un
collier, me confirmaient ton emprise. Cette emprise sur la liberté que j’ai
décidé de t’offrir. T’appartenir. Entière. S’accorder à tes mains comme le
feraient les notes d’un piano et te jouer la plus douce des berceuses pour que
ma musique t’enivre jusqu’au matin. Pour qu’entre un verre de vin et de la
musique, ce soit moi que tu récites en poème et que ce soit toi cette montagne
lointaine et inaccessible. La montagne que j’aurais gravie malgré mon vertige
pour pouvoir crier au monde entier : je l’ai conquis.
* *
*
La neige et le vent à l’extérieur ne sont
que le prolongement de mon âme qui agonise. Le froid est celui de mon être qui
se tord de douleur et qui préfère endormir le mal plutôt que de le ressentir. La
noirceur qui tombe sur la ville est l’étoile qui s’éteint au fond de ses yeux et
créera ma perte lorsque la mer sera noire et que le bateau s’échouera contre les
rochers. Il n’aura été qu’une sirène de plus à m’envouter. Riez, vous là-haut
qui contrôlez tout. Tirez sur les fils et dirigez ma vie tant que vous le
voudrez. Un jour, j’écrirais ma propre destinée et aucune ficelle ne pourra
s’attacher à l’encre sur mon papier. Le pantin que vous faites de moi ne sera
plus sous votre emprise et ce jour-là, c’est vous qui pleurerez. Moi, je
rirais.
*
* *
Lorsque j’étais enfant, je croyais que la plus grande
douleur que je pouvais expérimenter était celle que je ressentais suite à mes
chutes. Le moment où la terre et les cailloux se heurtaient violemment contre ma
peau jusqu’à créer des fissures ou des crevasses rougeâtres sur mes genoux ou
mes coudes. Ce qui était bien, à cette époque-là, c’est qu’un baiser et un
pansement arrivaient à faire oublier le mal. Camoufler la blessure et cesser de
souffrir; c’était aussi simple que ça. Et même lorsque je tombais, je me
relevais et continuais ma course, car je savais que le mal partirait une fois la
plaie recouverte.
Cependant, on ne m’avait jamais dit qu’en
vieillissant, je connaîtrais des blessures beaucoup plus profondes et
douloureuses. Des lésions qu’aucun bandage ne serait en mesure de faire
disparaître. Que mes chutes se feraient dans des gouffres davantage profonds et
que me relever me serait chaque fois plus difficile. Maintenant adulte, je
choisis les jeux auxquels je joue. J’en connais les règlements et même si je
savais exactement où le précipice commençait, je m’y suis jeté en espérant que
mon parachute s’ouvre au bon moment. Il s’est ouvert, mais je suis accroché
contre une des parois coupantes de l’abîme et chaque tentative pour remonter me
blesse. J’ai l’impression que je vais y laisser une partie de moi. J’ai beau m’y
accrocher de toutes mes forces, je me sens déjà glisser hors de ma portée. Je
vois ses yeux au fond de ce trou et même si j’ai envie de tout lâcher pour le
rejoindre, je sais que je dois le laisser partir. Même si pour cela, je dois y
laisser un morceau de moi. Ce fragment de ma vie que je lui ai entièrement
donnée, il doit repartir avec lui. Et si je lève les yeux au ciel, j’y vois tous
nos bons moments et toutes les fois où il a accroché un sourire sur mes lèvres
en effaçant, d’un seul regard, toutes mes douleurs passées.
Aujourd’hui, une nouvelle cicatrice s’est dessinée
sur l’enveloppe de mon âme. Elle a rejoint les autres que je collectionne depuis
vingt-deux ans. Toutes les coupures que j’aurais sur mes mains pour avoir
remonté, lentement mais sûrement, le précipice auront une valeur. La douleur
sera une leçon pour le futur. Et même si ma tête me chuchote : pourquoi
souffres-tu encore et toujours ? Mon cœur me répond : tu comprendras un
jour.
*
* *
Il vient un temps dans la vie où, parfois, on a envie
de tout abandonner. On souhaite tout simplement survivre dans une société où
plus rien ne nous émerveille et où il nous est difficile de respirer. Puis,
parfois, il y a, derrière un nuage, une surprise inattendue qui nous propulse,
sans demander la permission, vers des monts que l’on croyait inaccessibles. Nos
poumons s’emplissent d’espoir, notre tête de rêves et notre cœur s’emballe à
nouveau comme lorsque l’on était enfant. Sourire redevient facile et naturel,
respirer redevient agréable et rêver redevient vital. Lentement, le soleil
caresse de ses rayons, l’espoir qui décore notre visage en permanence et nous
illumine comme la pleine lune surplombant une forêt ténébreuse. Nos problèmes
nous semblent banals et l’on se sent capable de vaincre n’importe quel obstacle.
Tout est à notre portée, puisque nous marchons, à présent, main dans la main
avec les deux parties de nous-mêmes. Le vide qui, toute ma vie demandait à être
rempli, a retrouvé la pièce du casse-tête qui, comme effet secondaire, créer une
constellation dans mes prunelles arc-en-ciel.
*
* *
Le passé fait de nous, qui nous
sommes. Le présent sert à faire des expériences, alors que le futur est une page
blanche sur laquelle on écrira notre propre histoire. La vie est parsemée de
chemin, parfois droit, parfois sinueux, mais un jour on comprend que l’on est
exactement là où l'on doit être. Des gens vont et viennent dans notre vie,
jusqu’au jour où l’on comprend qui restera et qui partira. Et bien que
l’essentiel soit invisible pour les yeux, il ne s’agit parfois que d’un geste ou
d’un regard pour que l’on désire rendre certaines pages de notre livre
immortelles. Certains chapitres de vie s’écrivent mieux à deux… et tu es,
aujourd’hui et pour toujours, l’inspiration dans mon cœur et l’encre de ma
plume. ( Ceci est un texte écrit pour mon amoureux André.)
* *
*
On a souvent peur des
changements, mais c’est parfois lors de ceux-ci que l’on découvre vraiment qui
on est. C’est lorsque l’on est forcé de sortir hors de notre zone de confort que
la vie prend de la couleur. C’est lorsque l’on croit que c’est la fin, que tout
commence. Osez pour avancer. Avancez pour vivre. Et même si aujourd’hui je suis
différente, je reste toujours la même. Car même si notre tête et notre physique
changent, notre cœur demeure toujours inchangé. Il est seulement plus fort. Je
suis seulement plus forte.
Droit d'auteur : Stéphanie Dugas
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